mercredi 29 avril 2009

Lui

Ils déambulaient dans la ville, sans trop savoir encore où ils allaient. Paris, c’était un peu comme elle : il avait peur qu’en étant loin d’elle, il ne la reconnaisse plus quand il reviendrait, et qu’ainsi il laisse d’autres hommes habiter son cœur et son corps. Derrière ses grands yeux mats, il la redoutait, elle et sa candeur. Il lui demandait ses bonnes raisons pour l’aimer. Elle lui répondait : « J’aime ton sourire, ta vision poétique du monde, les grains de beauté sur ton torse, tes sarcasmes, ton regard lourd quand tu me vois nue, ton regard clair après que tu m’as fait l’amour. J’aime ton odeur, la façon dont tu mets ton bras sur mes épaules quand on marche comme si tu voulais dire aux autres que je ne suis qu’à toi. Je t’aime pour tout cela, parce que tu es à moi d’une manière unique, comme je suis à toi d’une manière unique, comme je ne l’ai été et ne le serai jamais avec aucun autre. Parce que tu es toi ».
Alors, ils repartaient, toujours plus loin sur les trottoirs secs, avec dans la bouche un avant-goût de printemps au beau milieu de l’hiver.

lundi 27 avril 2009

La femme de fer

C’était l’après-midi. Dehors, le vent murmurant contre la fenêtre dispersait les nuages. Dans la chambre, un autre murmure : le cliquetis mécanique des cheveux d’Eve qui tapaient contre les épaules de l’amant. Tandis que le fer froid tombait goutte à goutte sur leurs corps nus, leurs mains et leurs jambes entrelacés dans un bruissement furtif donnaient naissance aux soupirs rauques. Les draps plissés frottaient contre la peau douce et ses bas qu’elle avait gardé.
- Fusion intemporelle -
On voyait des stries de soleil passer à travers le filtre des volets.
Leur union finie, ils restèrent longtemps ensemble, l’un dans l’autre, jusqu’à ce que le soleil meure et que leurs cœurs s’apaisent… La main toujours perdue dans les cheveux d’Eve, l’amant s’étonna : « Encore ? ». Eve ne répondit rien, se contenta de sourire, les joues rouges et le souffle court. Puis, il lui dit: « J’avais l’impression que tes cheveux étaient en fer ». Elle sourit de plus belle. Les cheveux libres enfin, humide, elle le serra plus fort, et alors le métal des barrettes éparpillées sur le lit eut l’éclat de leurs yeux perdus : « Ta femme. Je suis ta femme de fer ».